« Avec le deuxième concerto, on sautait trente années. Le jeune pianiste farouche et maladroit (en amour) avait mué en compositeur illustre et, le sachant ou pas, transposait son problème d’homme avec les femmes en celui du piano avec le violon. Il est tout de même curieux que Bartók, à vingt ans d’intervalle, ait épousé des pianistes (ses élèves), après avoir aimé des violonistes. Ce créateur réputé froid, cérébral a écrit pour le violon les pages les plus enflammées. Mieux que beaucoup d’autres au tempérament « romantique » plus manifeste, il a su tirer de la voix, du timbre si particulier de cet instrument, et sans pathos, des accents de vérité pathétiques.
Dans cette partition sauvage, d’une extrême difficulté technique, qui exigeait de Frederika qu’elle arrachât à son violon des sons d’une férocité inouïe, la jeune interprète sut effacer la trace vénéneuse de son image publique et transporter d’enthousiasme un auditoire mal disposé à son égard. Pendant la courte demi-heure que durait le concerto, Peter, d’abord tendu, les mains moites, fut peu à peu gagné par un extraordinaire sentiment de gratitude. Ce n’était peut-être pas de l’amour, mais cela y ressemblait furieusement. »

Virtuoses, p. 63

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En librairie le 23 août 2012

ISBN : 979-10-90175-06-8
Format : 14 x 21 cm
Pagination : 400 pages
Prix : 19,50 €

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Été 2001. Le cinéaste européen Peter Waltman s’envole vers les États-Unis. Il doit y présenter son dernier film et réaliser pour Arte un documentaire consacré à la célèbre violoniste Frederika Murray. Il ne sait pas encore que Willy, son collaborateur sur de nombreux tournages au Moyen-Orient, vient d’être assassiné en Bavière.
Waltman découvre l’Amérique, fasciné par la beauté, la vitalité et la violence de ses villes : New York, Philadelphie, Washington, San Francisco, Los Angeles, Chicago… Il y croise son producteur, des patrons de majors californiens, des artistes, des journalistes mais aussi des êtres beaucoup moins favorisés, voire dangereux.
Ses incursions répétées avec Willy en terre d’Islam pour la BBC et d’autres chaînes lui ont fait côtoyer des figures majeures de la guerre d’Afghanistan contre les Russes, tels le commandant Massoud et Oussama ben Laden. Ont-ils filmé des choses qu’ils n’auraient pas dû voir ?
Dans ce roman conduit avec force, les événements suivent une pente surprenante et implacable qui n’interdit pas l’irruption de l’amour ni la hantise de la mort. L’auteur de Mes vies américaines y affronte la complexité du monde avec ce goût déjà ancien de l’art des naïvetés tempérées que peut enseigner la fréquentation assidue de Nabokov, Borges ou Gombrowicz.
Peter, Frederika, la plupart des personnages principaux sont autant de virtuoses qui jouent leur partition sans faiblir jusqu’à un certain jour tragique de septembre, dans une Amérique au tournant du siècle.

PARIS , FRANCE - APRIL 3: Max Geneve French Author , in Paris ,in France on April 3 , 2012.

Max Genève, né à Mulhouse en 1945, vit aujourd’hui entre Paris et Biarritz. Auteur de plus d’une vingtaine de romans, recueils de nouvelles, récits ou essais, cet écrivain inclassable s’est illustré dans des veines très variées avec toujours la même exigence littéraire : fantastique (Ramon, L’Ingénieur du silence…), musicale (Le Château de Béla Bartók, Le Violoniste, Mozart, c’est moi…), érotique (La nuit sera chienne, Chair…), policière (Autopsie d’un biographe, Le Tueur du cinq du mois…).

Virtuoses, enfin, illustre à merveille ce qu’on peut lire au sujet de Max Genève dans le Dictionnaire des écrivains contemporains de langue française par eux-mêmes : « Oui, le roman lui semble le meilleur véhicule pour avancer dans la connaissance de l’inconnu. Sexe, mélancolie, musique, métaphysique, tel sera le programme. Et la mort, toujours recommencée. L’Est donc, et le sombre. La lumière viendra bien assez tôt. »

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