« Depuis la disparition de son père, même ses rêves s’étaient remplis d’images obsédantes qui venaient éclater à l’improviste pendant la journée, comme des bulles à la surface d’une eau trouble et glacée. Des objets, des phrases, des regards même, lui revenaient, sans raison apparente, en mémoire. Le gant troué qu’il ne voulait pas jeter, une casserole où cuisait du chou rouge à la belle couleur douce et âcre à la fois, sa tête aux cheveux de neige, en contre-jour, la petite hache avec laquelle il coupait le bois, la chaîne qui faisait des nœuds dans le creux de son cou, les veines saillantes de sa main, une petite ride qu’elle aimait bien, au coin de son œil gauche, non, droit. Elle sentait alors son cœur se serrer, se serrer physiquement : ce n’était pas une image poétique, mais une sensation brutale, concrète, qui lui coupait le souffle. La même qu’elle ressentait, petite, quand elle le voyait prendre sa guitare et, soudain enflammé, se mettre à gueuler des chansons de Vissotsky pour combattre la mélancolie qui tombe avec la nuit. »
La maison Matchaiev, p. 54
En librairie le 18 Août 2011
ISBN : 979-10-90175-01-3
Format : 12 x 18 cm
Pagination : 256 pages
Prix : 17 €
À la mort de Sergueï Matchaiev, ses trois enfants, Pierre, Anne et Joshua, héritent de la maison paternelle en Bourgogne, dernier témoin d’une histoire familiale mouvementée, à l’image des romans russes que Sergueï leur lisait dans leur enfance. Ils ont entre vingt et trente ans. Ils vivent à Paris. Faut-il garder cette « maison d’un pendu » ou la vendre ? Que faire de ces souvenirs à la fois très doux et trop lourds ?Les enfants Matchaiev sont marqués par le poids de la honte, insidieusement mêlé à celui de la différence culturelle et sociale. Un héritage complexe lié à la langue, aux traditions, aux cicatrices de l’Histoire. Un héritage encombrant qui entraîne de leur part révolte et revendications.
Paradoxalement, c’est par une approche ludique, pleine de vivacité, d’humour et de tendresse, en prise directe avec les affres et les joies d’une jeune génération en quête d’identité, que Stanislas Wails, à la manière du Vereker d’Henry James, ou du Grifalconi de Georges Perec, tisse une trame romanesque réaliste et imaginative, incitant à la réflexion et à la rêverie.
La maison Matchaiev est son premier roman.